Touristes et égyptiens

2008

 

 Le 23 septembre, quelles nouvelles de l’Egypte ? Les tunnels sous la frontière avec la bande de Gaza ? Le bilan définitif des morts anonymes restés coincés sous les blocs effondrés du Moqattam ?

Non,  oubliés les habitants du bidonville enfouis à jamais sous d’énormes rochers. Cette fois, la nouvelle est reprise par toutes les agences : 11 touristes étrangers ont été enlevés dans le sud de l’Egypte. Qui deviennent 14 personnes, dont 10 touristes européens dans la dépêche suivante.

D’autres, prudemment, avancent « une quinzaine de touristes ». 

Quelques  questions me turlupinent alors : un, quelle est la différence entre une personne et un touriste ? Deux, quelle est la nationalité du onzième touriste? Trois : se peut-il qu’un égyptien soit aussi touriste dans son pays ?

J’ai assez vite la réponse à ma deuxième question : le groupe comprenait, précise un journaliste mieux renseigné, 5 italiens, 5 allemands et un roumain. Il me semblait pourtant que la Roumanie faisait partie de l’Union européenne. C’est même  le 7e pays le plus peuplé de l’Union. Mais les charrettes tirées par des ânes et des chevaux y côtoient, d’après le documentaire We feed the world, que je viens de voir,  les voitures les plus modernes. D’où un dilemme peut-être difficile à trancher : faut-il inclure le roumain (qui d’ailleurs est une roumaine, comme on l’apprendra le lendemain) dans les européens ou dans les « autres personnes » ?

Le lendemain, donc, l’info est reprise par tous les médias. Le groupe comprenait bien onze touristes, accompagnés de deux guides, quatre chauffeurs, l’organisateur du safari, et un garde-frontière. OK, la prochaine fois que je pars en trek, j’exige un garde-frontière…ça peut toujours servir. En tout cas, nos touristes étaient bien accompagnés. Quatre chauffeurs, n’était-ce pas un peu excessif ? Se pourrait-il qu’un touriste se soit déguisé en chauffeur ? Je voudrais tellement qu’un de ces touristes soit non seulement une personne, mais aussi un égyptien.

Vain espoir, je le crains : mes amis égyptiens sont un peu comme mes amis grecs il y a vingt ans : à moins d’être eux-même guide, il leur vient rarement à l’idée de visiter leur pays, dont des milliers de touristes viennent chaque année contempler les merveilles. On peut les comprendre. Voyager juste pour son plaisir, ça ne se fait guère ici. Quant à marcher dans le désert, ils ont eu leur compte pendant le service militaire. Pour voyager, il faudrait qu’il y ait une affaire à la clé. D’abord la famille, puis les amis, économiser pour acheter un appartement, pour se marier, pour payer une bonne école à ses enfants, et des cours particuliers pour leur assurer les meilleurs résultats au bac, par conséquent une bonne université.

Et la vie passe comme ça sans qu’on s’en rende compte. A moins qu’on soit si pauvre qu’on en meure avant.

Alors, finalement, il y a eu combien de morts dans l’effondrement du Moqattam?

PS : ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit… Aucun touriste, même européen, ne mérite la mort pour s’être baladé dans le désert un peu trop près du Darfour.

4 Réponses vers “Touristes et égyptiens”

  1. josiane said

    ha non pas toi ,le darfour est loin et ils ont assez de problèmes comme ça !
    sur cette histoire comme sur d’autres d’ailleurs les journaleux racontent n’importe quoi et illustre avec des touristes dans la vallée des rois comme si les otages avaient été enlevés au pied du temple d’abou simbel !alors que c’est a plus de 500km !certains voudraient ruiner l’egypte qu’ils ne s’y prendraient pas autrement !

  2. ludo said

    J’ai bien peur que ce soit plus de l’ignorance que de la malveillance. Pour beaucoup de journalistes (et beaucoup d’autres), l’Egypte, c’est la vallée du Nil, ils se rendent d’autant moins compte de l’immensité du désert qu’il y a de chaque côté que, souvent, les cartes ne montrent que la vallée et les côtes de la Mer Rouge, sinon ça prend trop de place.
    Quand aux touristes égyptiens (je ne parle pas des bédouins), ils n’aiment généralement pas le désert et en ont peur. Je me souviens de copains qui, au cours d’une ballade dans le Sinaï, ont préféré dormir dans la bagnole avec le chauffeur (qui ronflait horriblement) plutôt que de dormir dans le sable au fond d’un wadi avec nous.
    Et je ne parle pas des refus répétés d’autres amis de s’éloigner à plus de 20 km des bords du fleuve.

  3. Alexandrine said

    Et quel serait le bénéfice pour les journalistes de « ruiner » l’Egypte ? je ne comprends pas bien. Plutôt de l’incompétence oui, et des papiers faits trop vite sans vérifications.

  4. josiane said

    c’est terminé le feuilleton avec une bonne partie de pocker menteur !

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